Dessin : Sean Murphy
Synopsis :
1987, dans la banlieue de Belfast, un couple catholique s’apprête à diner avec leur fils de 5 ans quand ils sont assaillis par un groupe d’hommes lourdement armés. Tandis qu’il réplique à l’arme automatique, l’homme cache son fils dans un placard sous l’escalier en lui confiant un fusil d’assaut pour qu’il puisse se défendre le cas échéant. Transi de peur, l’enfant assiste dans l’obscurité à l’assassinat de ses parents avant d’être secouru par son oncle. Ce dernier abrège les souffrances de son frère avant d’emporter l’enfant dans sa fuite en jurant vengeance.
25 ans plus tard, le garçon est devenu un garde du corps froid et hyper-entrainé qui est entré au service d’OPHIS, une société américaine de production d’émissions de télé-réalité.
Cette dernière a décidé de lancer le premier programme télévisé de clonage humain ayant pour sujet le Christ lui-même. A partir de fragments d’ADN prélevés sur le Saint Suaire avec l’accord de l’Eglise et avec l’aide d’une scientifique titulaire du prix Nobel pour ses recherches sur la génétique, la société OPHIS a décidé de donner naissance à un enfant en prime-time le soir de Noël.
Installés sur un îlot artificiel dans les eaux non-territoriales pour profiter du vide juridique, la production doit faire face, dès le lancement du projet, à l’hostilité d’une partie du public, rangé derrière les ligues religieuses fondamentalistes, qui ont juré de faire obstacle au projet.
Le jour venu, Gwen, une jeune femme qui a été sélectionnée par OPHIS pour remplir le rôle de la mère, met au monde l’enfant tant attendu.
Mais peu à peu, Gwen commence à supporter de plus en plus mal la tension créée par les effets conjugués de la vie en vase clôt – rendue obligatoire par les tentatives d’agression répétées venant du monde extérieur – et de l’ingérence permanente de la production qui ne manque pas de créer des rebondissements artificiels pour maintenir l’attention du public autour du programme.
Avis :
Si certaines bandes dessinées vous laissent de marbre, certaines œuvres vous coupent le souffle. Punk Rock Jesus fait partie de la seconde catégorie.
Récit à la fois intelligent et « testostéroné », ce one-shot de Sean Murphy vous prend aux tripes dès la première page, pour ensuite vous dilater la rétine à la seconde et vous laisser groggy et songeur à la fin de la lecture.
A la fois récit d’anticipation et critique sociale, Punk Rock Jesus nous décrit un avenir (tellement) proche dans lequel une société de production a décidé de lancer un nouveau programme intitulé « J2 » dans lequel des scientifiques ont donné vie à un clone de Jésus Christ à partir de fragments d’ADN prélevés sur le suaire de Turin. Dès lors, une jeune femme vierge est choisie pour faire office de mère porteuse et le programme débute par son accouchement en direct un soir de noël.
A partir de ce concept, l’auteur nous entraîne dans un récit entremêlant le parcours de trois protagonistes de cette histoire : le jeune Chris, enfant transformé à la fois en produit de consommation et en icône religieuse, le docteur Sarah Epstein la scientifique à l’origine de cette prouesse génétique et Thomas Mc Keal, garde du corps en charge de la sécurité des principaux protagonistes, ex-membre de l’IRA, personnage à la fois ultra-violent et ultra-perturbé.
On songe immédiatement au Truman Show de Peter Weir pour le côté télé-réalité mettant en scène la vie quotidienne d’un être humain, mais l’auteur y ajoute une dimension mystique et politique en introduisant dans son récit des mouvements religieux paramilitaires, émanation du Tea Party US, bien décidés à s’opposer au projet , puis à libérer le jeune garçon du joug de ses concepteurs.
Il est intéressant d’avoir en tête le parcours de l’auteur : élevé dans un environnement religieux, Sean Murphy est devenu athée en 2003, période à laquelle il va commencer à écrire le scénario de cette histoire avant de le laisser reposer pendant plus de dix ans pour se consacrer à des œuvres de jeunesse moins sensibles.
Visuellement, Punk Rock Jesus est une vraie réussite. Certaines images vous suivront dans votre sommeil. Dans la veine des bons comics, Sean Murphy utilise un trait réaliste, très détaillé et très dynamique – osant tout de même quelques extravagances dans les scènes d’actions ou dans les véhicules des héros pour donner un maximum de peps à son propos – pour supporter un propos volontiers critique sur l’évolution de la société américaine en proie à ses dérives les plus sectaires comme les plus capitalistes.
Punk Rock Jesus est le cinquième titre de cet auteur américain à être publié en France et la lecture de cet album m’a donné envie de davantage découvrir son univers, notamment au travers de son premier album Joe, l’Aventure intérieure (2012) publié chez Urban Comics.
Si vous êtes las des suites interminables, si vous avez suffisamment lus de mangas pour cette semaine, si votre dernier roman graphique vous est tombé des mains, plongez-vous dans Punk Rock Jesus.
Salué par de très bonnes critiques à sa sortie en 2013, faites-vous votre propre opinion.
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