Scénario : Zidrou
Dessin : Oriol
Synopsis :
Dans des temps reculés, dans un monde peuplé de créatures fantastiques et de croyances ancestrales, un roi vieillissant, que le destin a comblé, voit arriver le crépuscule de sa vie avec la plus grande appréhension. Ne pouvait se résoudre à accepter l’inéluctable, il décide de convier en son château les trois plus grands savants du royaume pour que ces derniers puissent l’aider à trouver l’antidote pour ne pas mourir. Ne s’estimant pas satisfait des réponses promulguées par ses hommes de science, il leur fait successivement trancher la tête.
C’est alors qu’un mage se présente au château. Ce dernier, personnage mystérieux et terrifiant, propose un pacte au souverain. Contre la main de son unique fille, il lui promet de lui révéler le Savoir qui lui permettra d’ignorer la mort et son cortège de souffrances et de pourrissement. Le roi, terrifié à l’idée de passer de vie à trépas, et malgré la terreur que lui inflige cet étrange personnage, conclut un pacte avec le Mage. « Pour survivre, il te faudra manger la chair du plus valeureux de tes fils (…) c’est l’unique moyen pour toi d’échapper à la mort ».
Afin de tromper leur méfiance, le mage conseille en outre au roi de proposer à ses trois fils de partir accomplir un prodige afin que celui qui fera preuve de la plus grande bravoure soit désigné comme son unique successeur.
Les trois princes partent donc pour accomplir la noble mission que chacun s’est assignée.
Avis :
Il était une fois un roi, autrefois bienveillant, juste et magnanime, que la proximité du trépas avait rendu cruel et lâche. Terrifié par la mort, ce dernier devint prêt à toutes les ignominies pour échapper à ce funeste et inéluctable sort, y compris à pactiser avec un démon.
Sur ce postulat, Zidrou et Oriol nous offrent un conte tragique, sombre mais très poétique et superbement illustré. Un album attendu et très réussi.
Deuxième collaboration du duo après le très remarqué La peau de l’ours publié chez Dargaud en 2012, les deux auteurs changent de registre, tant dans la construction du récit que dans l’illustration. Côté narration, Zidrou privilégie un style linéaire propre aux contes traditionnels. Il utilise la répétition pour construire des parallèles entre les destins (les 3 savants, les 3 fils) et privilégie la concision aux discours fleuve. Côté illustration, Oriol délaisse les couleurs chaudes qui caractérisaient La peau de l’ours pour un registre beaucoup plus sombre, trouble, presque flouté qui met en exergue le côté fantastique. Le dessinateur installe une distance avec le lecteur, on découvre le récit comme dans une pensine « Harry Potérienne ». Enfin, le découpage et la mise en page laisse la place à des dessins de grande taille qui sont superbes.
Côté personnage, celui du mage, presque suggéré, dont ressortent tantôt ce rictus presque « Jokerien » tantôt ce regard hypnotique et inquiétant, est une vraie réussite.
Beaucoup d’éléments du conte sont présents (la famille, l’éloignement d’un membre, la transgression, la quête, l’objet magique, la résolution, le mariage / trône) et cette cohérence contribue à faire de ce récit une vraie réussite.
En tant que lecteur, je me suis senti hypnotisé par le récit, fasciné par les images. Cet ouvrage est un petit bijou de noirceur. L’un de mes coups de cœur de ce début d’année.
Prochain collaboration entre les deux auteurs prévue pour 2017. Alors, dans l’immédiat, ne boudez pas votre plaisir.
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