Sélection Rosebul – Novembre 2017

Traditionnellement le mois de novembre est un mois riche en bonnes publications. Parmi les nombreux très bons albums qui constituaient notre short-list (citons entre autres Dans la Combi de Thomas Pesquet de Marion Montaigne, Katanga Tome 2 de Fabien Nury et Sylvain Vallée, Undertaker Tome 4 de Meyer et Dorison, …), nous avons finalement retenu Emma G. Wilford de Zidrou (encore lui) et Edith chez Soleil et Ar-Men, l’enfer des enfers d’Emmanuel Lepage, un habitué lui aussi de nos sélections.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ar-Men, l’enfer des enfers

Germain est l’un des gardiens d’Ar-Men, le phare mythique qui garde l’accès occidental de la Bretagne. Edifice construit en pleine mer au large de l’île de Sein, sur un bout de caillou émergeant à peine des flots, ce phare fut pendant plus de cent cinquante ans occupé à temps plein par des hommes en charge d’en assurer le fonctionnement et de veiller à ce que jamais ne s’éteigne sa lanterne.

L’action se situe à la fin des années soixante. Germain fait partie de la rotation des quatre gardiens qui se succèdent, par paire. En ce lieu qui subsiste en marge du reste des hommes, l’homme a apporté avec lui sa solitude et ses blessures. Une nuit, tandis qu’une tempête a fait céder l’une des ouvertures du phare, l’eau, qui s’est engouffrée dans le corridor, a endommagé le crépi, révélant, sous la couche de peinture un texte écrit à même le mur. Il s’agit du récit de Moizez, unique rescapé d’un naufrage survenu au milieu du dix-neuvième siècle au large de l’île de Sein. Le jeune homme va se retrouver associé à la fabuleuse épopée de la création du phare d’Ar-Men.

Mêlant une nouvelle fois, fiction, documentaire et légende, ce nouvel album d’Emmanuel Lepage nous entraine dans une destination moins lointaine que ses précédents opus mais toujours un peu en marge du rythme effréné de notre quotidien. Dans la lignée de Voyage aux Iles de la désolation (2011) ou d’Un printemps à Tchernobyl (2012), l’auteur poursuit ses reportages-BD avec brio et il nous conte, à la fois la genèse et les péripéties de la construction de cet ouvrage d’art que constitue le phare d’Ar-Men. Entrecoupant son récit de références aux mythes et légendes bretonnes de la cité d’Yf, l’auteur nous instruit autant qu’il nous divertit.

Concernant les dessins, Lepage sort une nouvelle fois le grand jeu et alterne grands paysages maritimes empreints de réalisme et détours par l’art nouveau quand il s’agit de conter les mythes bretons. L’alternance entre les palettes de couleurs et de style rehausse la lecture et permet de rendre fluide les passages documentaires et narratifs. Pas de surprise, un très bel album une nouvelle fois.

Emma G. Wildford

Depuis quatorze mois, Emma attend le retour de son fiancé. Ce dernier avait promis de l’épouser pour ses vingt ans, mais la tentation du voyage a été trop grande pour ce fils d’explorateur qui a finalement décidé d’embarquer pour le compte du National Geographic à bord du Kinship, un navire en partance pour la Norvège, en quête de découvertes et de trésors.

Depuis plus d’un an, Emma est sans nouvelles de son futur mari, et elle ne peut se résoudre à ouvrir la lettre cachetée qu’il lui a laissée avant de partir au cas où il lui arriverait malheur. Elle décide donc de tout quitter, faisant fi des conventions qui règlent l’existence d’une jeune femme dans cette Angleterre victorienne où il est de bon ton de respecter la volonté des hommes et les bonnes mœurs.

Affrétant sa propre expédition, Emma se met en route pour la Norvège, sur les traces de son fiancé. Chemin faisant elle va non seulement perdre peu à peu ses certitudes, mais elle va surtout entamer un voyage initiatique en quête de sa propre existence.

Une nouvelle fois, Zidrou fait la démonstration de sa grande capacité à tisser des récits humanistes et à s’adapter à des univers graphiques différents. L’atmosphère langoureuse et parfois onirique du dessin d’Edith se prête parfaitement à cette intrigue qui dessine en filigrane le portrait d’une femme courageuse, entreprenante et terriblement moderne.

Le graphisme et la palette de couleurs d’Edith subliment cette histoire ou l’aventure et l’humour se mêlent harmonieusement pour servir un récit fluide et enlevé.

Cerise sur le gâteau, les éditions Soleil offre un superbe écrin à cette histoire avec une édition en forme de coffret agrémentée de bonus tantôt ludiques (une photo, un billet de bateau) tantôt complémentaires du récit (la fameuse lettre à ne desceller qu’à la fin de la lecture).

Leave a Comment

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.